subst. masc. C'estoit anciennement celuy qui s'estoit retiré du monde pour se donner entierement à Dieu, & vivre dans la solitude : tels estoient les Hermites, Anachoretes, qui s'estoient retirez dans les deserts, & hors le commerce des hommes. Anciennement il n'y avoit point de Moine qui fust Prestre, il estoit même deffendu au Prestres de se faire Moines, comme on voit dans les Epistres de St. Gregoire. Ils estoient autrefois tenus pour Laïques, & n'estoient distingués des autres que par leurs habits, & par une devotion particuliere. Le Pape Syrice fut le premier qui les appella à la Clericature dans la disette de Prestres où l'Eglise se trouvoit alors. Ce mot vient du Grec Monachos, qui signifie seul, à cause que les premiers Moines vivoient dans la solitude.

Aujourdhuy on appelle Moines, les Cenobites qui vivent en commun dans un Monastere, qui font des voeux de vivre selon la Regle establie par leur Fondateur, & avec un habit qui distingue leur Ordre. Ceux qui sont rentés s'appellent proprement Moines. Ceux qui sont Mendians s'appellent Religieux, quoy qu'à present on confonde les uns & les autres.

Les premiers Moines ont esté ceux de St. Basile, qu'on appelle en Orient Caloyers, ceux de St. Jerome, les Hermites de St. Augustin, & puis ceux de St. Senoist, de St. Bernard. Depuis sont venus ceux de St. François, de St. Dominique, & une infinité d'autres. On les distingue aussi par Moines blancs, Moines noirs, &c.

LES MOINES se distinguent en Moines de Choeur, ou Profez, & Moines Lais, qui sont destinés pour le service du Couvent, qui n'ont ny clericature, ny Litterature. Moines Cloistriers, sont les Moines qui demeurent actuellement dans la maison, par opposition aux hostes, qui ont des Benefices dependans du Monastere. On appelle aussi Moines Lais, & Oblats, des Soldats estropiés à qui le Roy donne une place, ou une portion monachale dans les Convents de sa fondation. Ils sont obligés de sonner les cloches, & de balayer l'Eglise.

On les distingue encore en Reformés, qui se sont rendus maistres des anciens Couvents sous pretexte d'y restablir l'ancienne discipline qui s'y estoit relaschée ; & en Anciens, qui sont demeurés dans le Couvent pour y vivre suivant l'estat où il estoit quand ils y ont fait leurs voeux, sans vouloir s'astreindre à la nouvelle Reforme. On appelle un Maistre-Moine, un homme fort consideré dans son Ordre.

On appelle Moine defroqué, un Moine renié, un Apostat qui a quitté son habit, & sa closture pour vivre en libertin dans le monde.

MOINE, est aussi un jeu d'Escoliers. Bransle moine, donner le moine est une malice de Page.

MOINE, est aussi un chauffelit qui sert à pendre un rechaut qu'on met entre deux draps pour les chauffer.

MOINE, en termes d'Imprimerie, est une feuille mal imprimée dont une partie n'a pas pris l'encre, de sorte qu'elle est en partie blanche, & en partie noire, comme l'habit d'un Moine, Cela arrive, lors que l'Imprimeur manque à bien toucher les formes.

MOINE, se dit proverbialement en ces phrases. Il est ras & tondu comme un Moine. Il est gras comme un Moine. On dit d'un meschant couteau, qu'il seroit bon à chastrer un Moine. On dit que pour un Moine l'Abbaye ne faut pas.

On dit aussi, Pour un Moine on ne laisse pas de faire un Abbé. On dit aussi de ceux qu'on n'attend point pour disner, qu'on les attend comme les Moines font l'Abbé. On dit aussi, que l'habit ne fait pas le Moine, pour dire, que ce n'est pas assez de prendre un habit de Moine, il faut aussi vivre selon sa Regle. Ce proverbe est ancien, & se trouve dans le Roman de la Rose, & vient de la question qu'on a agitée autrefois, s'il suffisoit du Noviciat & de l'habit pour estre capable d'un Benefice Regulier. Il a esté jugé que non, & qu'il faut estre Profés : ce qu'on doit entendre pour les collations ordinaires ; car il en vient plusieurs de Rome pro cupiente profiteri, ce qui oblige seulement à se faire Moine dans six mois.

MOINE BOURU, est un fantosme qu'on fait craindre au peuple, qui s'imagine que c'est une ame en peine qui court les ruës pendant les Avents de Noël, qui maltraite les passans. Regnier parlant de son valet dit,

Qu'il luy demande estonné,

Si le Moine bouru n'avoit point promené.