subst. m. Organe externe de l'odorat. C'est aux hommes cette partie éminente qui est au milieu du visage. Aux animaux ce sont les ouvertures qui sont au bout de leur teste. Le nez a trois os, un de chaque costé, separés par un tiers venant de l'os cribleux, comme par un mur mitoyen. La partie la plus pointuë de cet os s'appelle par les Medecins rachis, c'est à dire l'espine ; & la partie toute entiere se nomme le dos & le haut du nez. La partie basse ou le bout du nez est composée de cinq cartilages, deux élevez, & trois plus bas, entre lesquels ceux des costez forment les narines, qui se remuent quand on respire, On les nomme ailes ou ailerons, en Latin alae ou pinnae. Celuy du milieu s'appelle diaphragme, comme qui diroit cloison qui separe les deux ailes. Ses deux trous ou fenestres se nomment pores, conduits, narines, chambrettes & cavernes. Ses veines viennent des jugulaires, ses arteres des carotides, & ses nerfs de la troisiéme conjugaison. Le sommet du nez, à cause de la rondeur, s'appelle chez les Medecins Sphoerion, c'est à dire, bouton ou pommette. Le poil qui croist dans les narines n'a point de nom particulier en François. En Latin Festus l'appelle vibrissae, de vibrare, qui signifie branler & secoüer, parceque quand on l'arrache cela fait secoüer la teste. La partie interieure du nez où se fait l'odorat est composée des Apophyses mamillaires, & de l'os cribleux, situé au milieu de la base du front qui remplit presque tout le creux des narines, qui a une de ses parties toute percée de trous comme un crible, & l'autre spongieuse, d'où la pituite coule par l'entonnoir, comme par une chausse d'hyppocras, en la glandule biberonne dite colatoire ou basilaire. C'est là qu'abboutissent des nerfs qui sont mols, & qui ne sont point revestus de la pie ni de la dure mere, comme sont tous les autres nerfs ; & c'est là que les odeurs font leur impression. Les cavités du nez sont remplies de plusieurs lames cartilagineuses, separées & roulées en ligne spirale. Tous les trous de l'os cribleux ne sont que les intervalles qui les separent. Les chiens de chasse en ont plus que tous les autres animaux. Le Lievre, le Renard, le Porc Espy, le Chat, le Sanglier, en ont un tres-grand nombre, & l'homme en a le moins de tous. Les Egyptiens representoient un nez pour signifier un homme sage & prevoyant : d'où sont venuës les phrases Latines, nasutus homo, & emonctae naris. Et en Francois, il a eu bon nez.

On dit aussi qu'une personne a bon nez, quand elle sent de loin les odeurs bonnes, ou mauvaises. On dit que la moutarde prend au nez, quand les sels volatils de la moutarde passent par le Nez pour aller frapper le cerveau. Un nez aquilin, un nez de perroquet, un nez retroussé, un nez fait en pied de marmitte.

Chez les Mores les nez camus sont les plus beaux nez ; on leur applatit, on leur escache le Nez. En Tartarie les plus grandes beautez sont celles qui ont le moins de nez. Rubruquis a escrit que la femme du Cingis Cham n'avoit que deux tous au lieu de nez. On dit figurément, qu'une chose n'a point de nez, pour dire, qu'elle n'a point de grace, d'agréement. On couppe le nez aux passevalans, ils ont besoin d'un nez postiche. On dit qu'une femme a toûjours un masque sur le nez, quand elle va souvent masquée. On appelloit autrefois un tours de Nez, ou cache-nez, une espece de masque que portoient les Dames de condition, qui ne leur couvroit que le nez, & qu'elles portoient dans les ceremonies.

Ambroise Paré au Livre 23. fait mention d'un Chirurgien d'Italie qui faisoit revenir les nez couppez ; Il ouvroit le bras du malade dans les chairs, & y faisoit entrer ce reste de nez, & les ayant liez ensemble pendant 40. jours, le nez prenoit chair dans cette playe, & se colloit avec la chair du bras, puis il couppoit la chair du bras, façonnoit le nez comme il devoit estre, & pensoit ces playes à loisir.

NEZ, se prend quelquefois pour tout le visage, & pour tesmoigner la presence de la personne. Ces gens se sont rencontrez nez à nez. C'est un un impudent qui luy a reproché cela à son nez, qui luy a dit des injures à son nez. C'est un homme qui va le nez levé, à qui on ne peut rien reprocher. Celuy-là marche le nez dans son manteau, dans son manchon, il n'oseroit monstrer son nez en une telle assemblée. On le dit aussi des soldats enfermez dans une place, qui n'oseroient monstrer leur Nez, pour dire ; paroistre à descouvert, sortir en campagne. On dit aussi, qu'un homme a toûjours le Nez sur les livres, qu'il ne leve pas le Nez de dessus la besogne, pour dire, qu'il y est fortement attaché.

On dit en ce sens, qu'un homme fourre son nez par tout, qu'il met le Nez dans une affaire, pour dire, qu'il s'en veut mesler, qu'il en veut prendre connoissance. Il ne faut point fourrer son nez dans les affaires d'autruy. Dés que cet Advocat a mis le Nez dans un sac, il voit où est la difficulté de l'affaire.

En termes de Manege on dit, que les Chevaux portent le nez au vent, ou portent au vent, pour dire, qu'ils levent le Nez aussi haut que les oreilles. C'est le contraire de porter bas. On le dit figurément des femmes estourdies esventées, & qui levent trop la teste.

On dit qu'un homme parle du Nez, lorsqu'il ne parle pas nettement, qu'il parle comme un tuyau d'orgue. On dit que le Nez lui coule, qu'il a la roupie au nez, quand il est enrhumé. On appelle quelquefois un yvrogne un nez de betterave, un nez boutonné, bourgeonné, enluminé. On appelle nez gravé, celuy à qui il est demeuré plusieurs marques de la petite verole.

On dit en termes de Chasse, qu'un chien est de haut nez quand il va requerir sur le haut du jour ; qu'il a le nez fin, lorsqu'il chasse bien dans les chaleurs & dans le poussier ; & qu'il a le nez dur, lorsqu'il entre mal-aysement dans la voye.

On appelle le nez d'un soufflet, la partie qui se termine en pointe, & sur tout celle des soufflets d'orgue, ou de forge.

On appelle un nez de bateau chez les Bateliers, la pointe du bateau. On le dit aussi sur la mer, des vaisseaux : Le Chevalier Petti Anglois se vantoit d'avoir inventé un vaisseau qui ne pourroit jamais porter le nez dans l'Eau quelque tourmente qu'il arrivast.

NEZ, se dit proverbialement en ces phrases. On dit qu'un grand nez ne gâte jamais un visage. On dit qu'une fille a le nez tourné à la friandise, qu'elle n'a point le Nez tourné à la Religion, pour dire, qu'elle a la mine d'estre de complexion amoureuse. On dit qu'un homme saigne du nez, quand la timidité l'empesche d'executer quelque chose qu'il avoit entreprise, ou promise. On dit Rire au nez de quelqu'un, pour dire, Se moquer de luy : le regarder sous le Nez, pour dire, le morguer, le vouloir choquer. Luy tirer les vers du nez, pour dire, luy tirer adroitement un secret. On dit qu'il vaut mieux laisser son enfant morveux, que de luy arracher le Nez, pour dire, qu'il faut quelquefois souffrir un petit mal, de peur d'un plus grand inconvenient. On dit aussi pour marquer qu'on mesprise quelque discours, ou quelque entretien, il me semble qu'on me pele le nez.

On dit aussi pour faire injure à quelqu'un, qu'on lui a jetté au nez sa marchandise, son argent, qu'on luy a reproché quelque defaut, quelque mauvaise action ; qu'on luy a fermé la porte au Nez, pour dire, qu'on ne l'a pas voulu recevoir en sa maison. C'est pour vostre nez, ou, cela vous passera bien loin du Nez, pour dire, Cela ne sera pas pour vous. On dit aussi, qu'il a eu un pied de nez, pour dire, qu'il n'a pû venir à bout de quelque chose, qu'il a donne lieu à la raillerie. On dit aussi, qu'on luy a donné sur le Nez, pour dire qu'on l'a souffletté. On appelle aussi un nez à nazarde, un nez malfait, celuy d'un homme qui ne se sçait pas deffendre.

On dit aussi, un beau Nez à porter lunettes, quand on se veut mocquer d'un grand nez. Cela paroist comme le Nez au visage, pour dire, qu'une chose est claire & évidente. On dit aussi de ceux qui n'ont rien à faire, qui se promeinent, qu'ils viennent regarder qui a le plus beau Nez : on dit aussi, qu'un homme est heureux comme un chien qui se casse le nez, par une antiphrase. On dit encore pour reprocher à un jeune homme son peu d'experience, Si on vous pressoit le nez, il en sortiroit du lait.

On dit au figuré, qu'un homme a bon nez, lorsqu'il a beaucoup de sagacité, qu'il prevoit de loin les évenements d'une affaire. Et au contraire, on dit qu'il ne voit pas plus loin, que le bout de son nez, quand il n'a aucune prevoyance. On dit aussi, qu'il s'est cassé le Nez, qu'il a donné du Nez en terre, lorsqu'il a mal reüssi en quelque affaire, qu'il a fait banqueroute : & au contraire, qu'il s'est bien refait le Nez, quand il y a bien fait son profit. On dit qu'il a esté pris par le Nez comme un bufle, pour dire, qu'il s'est laissé tromper, amuser, conduire. On dit aussi, qu'il a pris son nez pour ses fesses, pour dire, qu'il s'est trompé luy-même, qu'il s'est mespris.