subst. masc. Espece de sel fossile & blanc qui se trouve meslé parmy la terre. On le tire de cette terre en la lavant avec de l'eau qui s'impregne de ce sel, qu'on fait aprés cuire en la faisant évaporer, ainsi qu'on fait au salpestre. Les pierres dont on le tire participent de la nature du plomb, & contiennent du flegme & des esprits acides. La terre dont on a tiré l'alun estant exposée à l'air, en fournit de nouveau. Il en est de même du vitriol calciné : ce qui montre que ces sels viennent de l'air. Ce mot vient du Grec hals qui sign. sel.

Il y a cinq sortes d'alun. Le premier l'alun de glace, ou de roche, est celuy qu'on tire tout entier de la roche, qui est blanc & transparent. La roche est élevée hors de terre : ce qui n'empêche pas qu'on ne fasse plusieurs lotions & preparations à l'alun de roche tel qu'il nous est envoyé, qui sont amplement descrites par Matthiole. Il y en a aussi du rougeastre, qu'on appelle le Romain. Pline dit en avoir veu de noir. C'est une substance terrestre, congelée & luisante, de nature chaude & seche, de saveur aspre & salée, qui a la proprieté de restraindre & de ronger. Biringuccio.

La seconde espece est l'alun de plume, ou scissile, qui est comme la fleur de l'alun, selon Dioscoride. Il se trouve en mottes, & il a une consistence entre le bois & la pierre. Il se fend aisément, & peut servir d'une mesche perpetuelle à une lampe. Matthiole & Dioscoride disent que c'est la même chose que la pierre Amiante. Il est moins corrosif que l'alun de roche. On l'appelle ainsi, à cause de ses filamens qui sont comme des plumes. Il a des veines comme du bois. Quelques-uns l'ont fait passer pour du bois de la vraye croix, & disent qu'il resiste au feu par miracle.

Le troisiéme est l'alun scaiol, qui est escailleux & transparent comme le talk. Il est ainsi nommé, eò quòd secetur. Il est fait d'une pierre claire comme verre, que quelques-uns appellent Pierre speculaire, ou Miroir d'asne, qu'on calcine, & qui paroist aprés comme du plastre.

Le quatriéme est l'alun zuccharin, ainsi dit par la forme de pain de sucre qu'on luy donne estant preparé avec eau rose & blanc d'oeuf.

Le cinquiéme est l'alun catin, qui est la même chose que l'alkali, ou sel de soude, ainsi dit à catino, ou plat dans lequel on le fait. Le mot d'alun vient à lumine, parce que c'est luy qui donne la lumiere ou l'éclat aux couleurs. On ne sçauroit gueres teindre, ni enluminer sans alun : car c'est le principal des sels mineraux dont on se sert dans la teinture, & c'est comme un lien entre l'estoffe & la couleur ; de même que les huiles gluantes & les eaux gommées sont un lien à l'égard de la peinture & de l'enluminure. L'alun dispose les étoffes à recevoir la couleur, & à leur donner la vivacité, comme on voit à la cochenille & à la graine d'escarlate, dans lesquelles on mesle aussi quelque acide, & même de l'eau forte, pour donner de la vivacité à leur couleur rouge, & leur oster le violet. L'alun fait ses effets par la stipticité ou vertu astringeante qui lie la matiere delicate des couleurs, & empêche qu'elles ne s'évaporent. L'alun empêche que le papier qui en est trempé ne boive. Tout alun dissout dans l'eau qui vient à se coaguler, prend la figure pyramidale, ou le tetraedre composé de quatre triangles fort égaux. Les Anciens ont parlé d'un alun rond qui est à present inconnu.