subst. fem. & autrefois masculin. C'est le plus grand & le plus harmonieux de tous les instruments de Musique, qui est particulierement en usage dans les Eglises pour celebrer l'Office divin avec plus de solemnité. On fait pourtant dans les maisons particulieres quelques orgues portatives, qu'on nomme cabinets d'orgues ; mais dans les Eglises on appelle buffet d'orgue, cette construction de menuiserie qui enferme toute la machine. Le grand Buffet sert pour le grand jeu, qu'on appelle le grand corps, & le petit Buffet pour le petit jeu, qu'on nomme le positif. Ce mot vient du Latin organum. St. Augustin appelle organa, tous les instruments de Musique, & principalement celuy qui jouë avec des soufflets. Isidore en a fait aussi un nom general.

L'Orgue est composée de plusieurs tuyaux qui reçoivent le vent de gros soufflets, lequel est distribué par un sommier, & par le moyen de plusieurs registres, qui ouvrent & ferment les ouvertures de ces tuyaux ; & il y entre selon qu'on appuye les doigts sur les differentes touches du clavier.

On appelle accompagnement en l'orgue, les divers jeux qu'on touche pour accompagner le dessus, comme sont le bourdon, la monstre, la fluste, le prestant, &c. Ceux de la grande orgue sont differents de ceux du positif.

La pluspart des pieces qui composent l'orgue sont expliquées à leur ordre alphabetique. On dira seulement icy, que le chassis est une des principales pieces de l'orgue, par ce qu'on enchâsse dedans l'ais du sommier sur lequel on pose les tuyaux. On applique sur la table du sommier des tringles d'espaisseur de membrure, qu'on appelle barreaux, esloignées les unes des autres de deux doigts, pour faire place à 48. raynures ou crans, ou graveures, sur lesquelles on met des chappes ou des ais qui les couvrent ; & dans l'intervalle vuide de ces raynures, on fait entrer des regles plattes & mobiles en forme de lattes, qu'on nomme registres. On perce ces trois pieces vis à vis l'une de l'autre, pour donner passage au vent dans les tuyaux, lesquels on applique sur le plus haut de ces trous ; & cet assemblage s'appelle le sommier de l'orgue. On appelle le secret de l'orgue, une layette ou quaisse où est receu & reserve le vent de la soufflerie pour le distribuer par les sous-papes au sommier qui est derriere. Vitruve le nomme le sommier canon Musical.

On appelle le tamis, la piece de bois percée, à travers laquelle passent les tuyaux de l'orgue, & qui les tient en Estat.

L'Orgue à deux ou trois, & quelquefois quatre ou cinq claviers dans les grands buffets. Ils sont divisez en plusieurs touches ou marches, comme ceux de l'Espinette & du clavessin. Chaque octave doit avoir 13. marches, & le clavier harmonique parfait en doit avoir 19. Une orgue a pour le moins 2000. tuyaux tant dans le grand buffet que dans le positif, & elle a jusqu'à 8. octaves d'estenduë, depuis le tuyau de 32. pieds jusqu'à celuy d'un demy-pied. Ces tuyaux sont de bois, d'estaim, ou de plomb. Il y a des tuyaux à anche, & des tuyaux ouverts, & d'autres bouchez, où on remarque que le tuyau bouché descend deux fois plus bas que celuy qui est deux fois plus long, & qui est ouvert, parce que l'air qui y entre, & qui en sort, a deux fois autant de chemin à faire. Les tuyaux à cheminée sont ceux qui ont un petit tuyau soudé au bout d'un haut d'un plus grand.

Les simples jeux de l'orgue sont la monstre, le premier & le second bourdon, le prestant, la doublette, le flageolet, le nazard, la fluste d'Alleman, la tierce, la fourniture, la grosse cimbale, la seconde cimbale, le cornet, le larigot, la trompette, le clairon, le cromorne, la regale ou la voix humaine, la pedale, la trompette & la fluste de pedale, sans compter le tremblant, qui n'est qu'une modification des jeux.

De ces jeux on en fait plusieurs composez qu'on varie en une infinité de façons. On appelle le plein jeu de l'orgue, celuy qui est composé de la monstre, du bourdon, du 16. & du 8. pieds, du prestant de la doublette, de la fourniture & de la tierce. Les facteurs d'orgue y adjoustent d'autres jeux, ou en retranchent, suivant leur different genie, ou la dépense qu'on y veut faire.

On appelle le temperament de l'orgue, une diminution du ton majeur d'un comma, dont on augmente le ton mineur par une espece d'equation, pour les rendre plus justes. L'Invention de l'orgue est fort ancienne : Vitruve en d'escrit une dans son X. Livre. L'Empereur Julien a fait une epigramme à sa loüange. St. Hyerosme fait mention d'une orgue qui avoit douze soufflets, dont la layette estoit faite de deux peaux d'élephant, & on l'entendoit de mille pas. Il dit qu'il y en avoit une à Jerusalem qu'on entendoit du Mont des Olives.

On appelle aussi orgues, le lieu de l'Eglise où sont les orgues. Il est allé aux orgues entendre le Sermon. Ce mot vient du Latin organum. Salomon de Caux dit que le premier Auteur qui a escrit de l'orgue, est Heron Alexandrin dans ses Pneumatiques. Le Pere Mersenne a fait une ample description de l'orgue, aussi-bien que Salomon de Caux. Le Begue a fait imprimer plusieurs pieces d'orgue, qui font voir comme on en peut mesler les jeux agreablement. Les annales de France font mention que les orgues furent apportées en France à Pepin estant à Compiegne en l'an 757. avec autres presents que luy envoya l'Empereur Constantin. Il y avoit des orgues dans l'Eglise de Veronne sous le regne de Charlemagne.

ORGUES, en termes de Guerre, est une machine composée de plusieurs gros canons de Mousquet, attachez ensemble, dont on se sert pour deffendre les bresches & autres lieux qu'on attaque, par ce qu'on tire par leur moyen plusieurs coups tout à la fois.

ORGUES, est aussi une espece de herse, avec laquelle on ferme les portes des villes attaquées. Ce sont plusieurs grosses pieces de bois qu'on laisse tomber d'en-haut, & qui ne sont point attachëes l'une à l'autre par aucune traverse, comme sont les herses ordinaires, ou Sarrasines.

ORGUES, en termes de Marine, sont des trous & ouvertures qui passent au travers du bordage du vaisseau le long des tillacs ou des sabords, qui servent de goutieres pour l'escoulement des eaux. On les appelle autrement dalots.