s. m. Gros poisson de mer dont on trouve quantité vers la riviere des Amazones. C'est le meilleur de tous les animaux pour la nourriture de l'homme. Il a le corps fait comme une baleine jusqu'à la queuë, qui est platte & arrondie au contraire des autres poissons. Sa teste est comme celle d'une taupe, son museau comme celuy d'une vache, ses yeux comme ceux d'un porc, ses machoires comme d'un cheval, excepté qu'il n'a point de dents devant, mais seulement une carnosité dure comme un os, avec quoy il pince l'herbe. Il a trente-deux dents molaires aux côtés des deux mâchoires. Ses yeux sont tres-petits, aussi-bien que ses nerfs optiques. Ils n'ont point d'Iris, & fort peu d'humeur. Il n'a que tres-peu de cervelle. Il a tous les organes necessaires à l'ouïe, & il entend le mieux de tous les animaux ; car il entend du fonds de l'eau, & pour le pescher il ne faut point faire de bruit. Il n'a point de langue, & ressemble par dedans fort à la tortuë. Son sang n'est ni chaud, ni froid, & ne se fige jamais. Ses parties genitales tant internes qu'externes ressemblent plus à celles de l'homme & de la femme, que d'aucuns autres animaux. Les femelles ont deux mammelles, qui en leur situation, grandeur, figure & substance sont comme celles des femmes noires. Elles n'ont qu'un petit à la fois, & elles le portent toûjours avec elles jusqu'à ce qu'il ait la force de paistre, qui est au bout d'un an. Elles n'ont que deux ailerons ou pattes qui sont comme des bras, avec quoy elles tiennent toûjours leurs petits, & ils ne se separent point, soit qu'on tuë le petit, ou la mere. Le lamentin a depuis son col jusqu'à la queuë une espine dorsale composée de cinquante-deux vertebres semblables à celles du cheval, venant à diminution par les deux bouts. Sa chair est comme celle d'un veau, & sa graisse a du rapport à celle d'un porc, & a aussi bon goust. Il se nourrit comme la tortuë, va boire dans la riviere, & ne va jamais à terre, ne peut marcher, ni ramper hors de leau, & est gros comme un boeuf. Les Espagnols le nomment pece buoy. Il a par tout le corps du poil fait comme la soye du porc blanc. Son cuir est fort espais, & étant bien conrroyé, on en fait des targues qui resistent à une bale de mousquet. Celuy qui mange de sa chair est mieux nourry que s'il mangeoit une fois autant de mouton. Il n'a pas la respiration libre dans l'eau : c'est pourquoy il met souvent le mufle dehors, & alors on l'arreste avec des harpons. Il est de grand debit dans les Antilles.