v. n. Se sauver, s'enfuir, se garentir du danger, de la prison, & de tous les autres accidents nuisibles. Le naufrage a été si grand, qu'il n'en est eschappé aucun pour en porter la nouvelle. Ce poltron a fuy de bonne heure, il est eschappé de la deffaite. Cet Officier étoit prisonnier de guerre, il s'est eschappé adroitement de ses gardes. Ce mot vient du Latin scaphare, qui signifie s'enfuir avec un esquif. Il vient plûtost d'achap, vieux mot Celtique ou Bas-Breton signifiant la même chose.

ESCHAPPER, se dit figurément en Morale, en parlant des emportements de colere. Quand un valet est insolent envers son Maistre, la patience eschappe aux plus moderez. Cet Auteur est trop emporté, il s'est eschappé à dire plusieurs injures dont il se seroit bien passé.

On dit aussi, qu'un mot est eschappé par mesgarde, pour dire, qu'on a eu l'imprudence ou l'indiscretion de dire quelque chose secrette, choquante ou nuisible. Rien n'eschappe à la prevoyance de ce Ministre, il donne ordre à tout. Cela m'est eschappé de la memoire, je ne m'en souviens plus. Il a laissé eschapper cet ouvrage, il l'a laissé voir en public.

ESCHAPPER, se dit aussi des estoffes qui sont descousuës, parce qu'on n'avoit pas fiché l'aiguille assez avant pour les retenir.

ESCHAPPER, en termes de Manege, ou, Laisser eschapper, c'est, Pousser un cheval à toute bride, le faire partir ou eschapper de la main.

ESCHAPPER, se dit proverbialement en ces phrases. Il est eschappé d'un grand naufrage, pour dire, Il s'est tiré d'une affaire qui luy devoit estre fort ruineuse. On dit aussi, qu'un homme l'a eschappé belle, pour dire, qu'il s'est sauvé d'un grand peril, que peu s'en est fallu qu'il n'ait esté pendu, noyé, qu'il n'ait été pris prisonnier, &c. On dit qu'un jeune homme fait le cheval eschappé, pour dire, qu'il est libertin, qu'il est emporté, quand il est hors de la veuë de ses Maistres. On dit encore, Il n'est pas eschappé qui traisne son lien.