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s. f. Maladie qui vient d'une intemperie chaude & seche du sang & des humeurs, qui du coeur se communique à tout le corps par les veines & les arteres, & qui se connoist par une violente agitation du pous, & est ordinairement precedée d'un frisson. Ce mot est derivé du Latin febris, à fervendo : ce qui monstre fort bien l'analogie du mot que les Grecs employent pour signifier la même chose, sçavoir puretos, de pur, ignis, feu.

Il y a plusieurs especes de fievres, dont le nom & la distinction viennent de l'humeur qui la produit, du temps qu'elle dure, & de ses accés ou redoublements : & comme il y a quatre humeurs, il y a quatre sortes de fievres, la sanguine, la bilieuse, la pituiteuse, & la melancolique.

La fievre chaude, que les Medecins appellent fievre ardente, & en Grec Kaysos, est une fievre fort aiguë, qui est allumée particulierement en l'humeur colerique. Quand elle est chaude au dedans & que les parties exterieures sont froides, on l'appelle lypirias, qui est la plus dangereuse de toutes les fievres.

La fievre qui vient du sang est appellée Synoque, & est toûjours continuë, n'ayant qu'un même degré de chaleur depuis son commencement jusqu'à la fin, quand elle est simple ; mais quand elle est compliquée avec quelques fievres putrides, elle a des remissions & des redoublements. Or cette fievre putride n'est autre chose que cette intemperie allumée dans le coeur par le moyen de quelque humeur qui se pourrit dans le corps.

La fievre synoque putride, est celle qui est contenuë dans les grands vaisseaux entre les aînes & les aisselles. Il y a quatre especes de fievre continuë, la synoque simple, la quotidiane continuë, la tierce continuë, & la quarte continuë, lesquelles ne sont autre chose qu'une fievre continuë qui a des accés ou redoublements tous les jours, ou de deux jours l'un, ou deux fois en quatre jours.

La fievre intermittente, est celle dont la matiere est hors des veines, contenuë & resserrée dans les entrailles. Celle-cy est de trois sortes.

La quotidiane, qui prend tous les jours, & qui est causée par la pituite corrompuë.

La fievre double quotidiane, est celle qui prend deux fois en 24. heures, & est causée par la pourriture de la pituite, qui est en deux divers foyers.

La fievre tierce, qui ne prend que de deux jours l'un, & qui est causée par la bile.

La quarte, qui ne vient que le quatriéme jour, & qui laisse deux jours de repos qui est causée par la melancolie. Il y a aussi des fievres tierces continuës ardentes, qu'on appelle à Montpellier Trousse-galant.

La fievre tierce legitime se fait de bile pure ; mais la tierce bastarde ou illegitime se fait quand il y a quelque autre humeur qui y est meslée. On l'appelle aussi fievre étenduë, parce qu'elle a quelquefois des accés de 30. & 40. heures.

La fievre demi-tierce, est celle qui participe de la tierce & de la quotidiane, & qui est engendrée partie de la bile, partie de la pituite, qui sont corrompuës en divers foyers.

La fievre double-tierce, est une fievre composée de deux tierces, causée par une bile qui se pourrit en deux divers lieux hors des grands vaisseaux. Elle prend deux jours consecutifs, comme la quotidiane. Elle n'en est distinguée que par les signes & symptomes. Quelquefois elle donne deux accés ou redoublements le même jour ; & quelques-uns disent que ce sont deux tierces.

La fievre triple-tierce est causée par la bile qui se pourrit en trois divers foyers hors des grands vaisseaux, & elle donne trois accés ou redoublements en deux jours.

La fievre quarte, est celle qui vient de 4. jours en 4. jours.

La legitime, est celle qui laisse deux jours de repos & d'intermission, & qui s'engendre de pure melancolie.

La bastarde, ou l'illegitime, est celle qui est causée par le meslange de quelques autres humeurs en divers foyers.

La fievre double-quarte, est celle qui se fait d'humeur melancolique qui a deux differents foyers hors des grands vaisseaux, qui travaille le malade deux jours consecutifs, & ne luy en laisse qu'un de bon.

La fievre triple-quarte, est causée par la melancolie corrompuë en trois divers endroits du corps hors des grands vaisseaux. Cette fievre prend tous les jours.

Il y a aussi une fievre composée d'une quarte intermittente, & d'une tierce continuë, qui a des redoublements de 60. heures & des intermissions de 12. Il y a encore des fievres intermittentes qui prennent de cinq en cinq jours, ou de six en six, ou de sept en sept, & en d'autres intervalles.

La fievre confuse, est celle qui est engendrée de diverses humeurs corrompuës & meslées en un même foyer.

Les fievres putrides, sont celles qui ont leur siege dans les humeurs.

La fievre ephemere, est celle qui ne dure que 24. heures. Celle-cy n'est pas dangereuse. On l'appelle aussi diaire. Elle vient le plus souvent du vice de l'estomac, & elle a son siege aux esprits.

La fievre ectique, est une fievre lente qui s'attache aux parties solides, comme les chairs & les os. Elle est ainsi nommée du mot Grec exis, qui signifie habitude, parce qu'il est difficile de la chasser des parties où elle s'est attachée. Elle a trois degrez : le premier est, quand elle consume l'humidité des parties solides : le second, quand elle devore leur substance charneuse : le troisiéme, quand elle s'attache aux os & les destruit, & alors elle est incurable. Elle fait comme la flamme, qui consume d'abord l'huile d'une lampe, puis l'humidité du lumignon, & enfin le lumignon même.

La fievre symptomatique, est celle qui n'est pas essentielle, mais qui survient comme quelque accident à une autre maladie ou blessure qui la precede. Ainsi la fievre chaude provient de l'inflammation des membranes du cerveau. Elle s'appelle phlegmonneuse, quand elle vient par la corruption du sang qui est au cerveau ; & éresipelateuse, quand c'est par l'inflammation de la bile sur les membranes.

La fievre lente, est celle qui vient d'obstruction, & d'un feu caché qu'à peine le malade apperçoit, comme celle qui vient des pasles couleurs : & elle devient continuë, lors que le poulmon, le foye ou la ratte, & autres parties necessaires à la vie se corrompent en leur substance. Elle consume peu à peu le malade, & differe pourtant de l'ectique, en ce que l'ectique est sans pourriture.

On appelle aussi, fievre erratique, une fievre qui vient aux filles par la suppression de leurs mois, laquelle ne garde aucun ordre, & qui fait sentir en même temps froideur & chaleur.

Enfin il y a des fievres extraordinaires, comme les pestilentielles, malignes, purpurées, celles de pleuresie, de coqueluche, l'éphemere des Anglois, &c. qui ont diverses causes & complications, & des symptomes dangereux & mortels. On tient que personne ne meurt sans fievre, non pas même ceux qui meurent de mort violente. Anthoine Menjot sçavant Medecin a fait une Histoire des fievres malignes, & de leur cure.

On appelle foyer de la fievre, le lieu où est son siege, où reside l'humeur qui la cause, comme le mesentere, &c. & accés de fievre, un effort que fait la nature irritée pour se depestrer de l'humeur qui la tourmente.

On dit aussi au plurier, Avoir les fievres, pour dire, Avoir la fievre tierce ou quarte, lors qu'on en a plusieurs accés, & qu'elles tirent en longueur. Le meilleur remede qu'on a trouvé contre la fievre, est le Quinquinna.

Donner la fievre, se dit non seulement au propre, pour signifier Causer la fievre, ou la communiquer, mais aussi au figuré, pour dire, Faire peur, donner l'alarme à quelqu'un. On a donné advis à ce Prieur, qu'on avoit jetté un devolut sur son Benefice, cela luy a donné la fievre, l'a allarmé.

On dit proverbialement, Vos fievres quartaines, quand on veut faire une imprecation contre quelqu'un, laquelle est particuliere aux François, parce qu'étant naturellement prompts & impatients, ils croyent souhaitter plus de mal à leur ennemi en leur souhaittant une maladie de longue durée, telle qu'est la fievre quarte, que s'ils leur souhaittoient une maladie plus courte & plus dangereuse. On dit aussi, Quand on ne jouëroit que des fievres quartaines, que chacun les veut gagner. On dit d'un paresseux ou poltron, qu'il a la fievre de veau, qu'il tremble quand il est saoul. On dit encore, Tomber de fievre en chaud mal, pour dire, Changer de malheur, en éviter un, pour tomber en un autre. Ce vers respond à un fameux proverbe Latin,

Incidit in Scyllam, cupiens vitare Charybdim.

Ce vers si celebre est tiré d'un Auteur assez obscur, nommé Galterus, ancien Poëte qui escrivit en vers la vie d'Alexandre. On dit d'un homme qui merite le mal qu'il souffre, que cela est employé comme fievre en corps de Moine. On dit, que les lyons & les lievres ont toûjours la fievre ; les premiers par ardeur de courage, les autres par timidité.