v. act. & n. Donner aux aliments une preparation convenable par le moyen de la chaleur, pour les rendre plus faciles à digerer. On le dit tant de ce qui se cuit dans le pot avec de l'eau, que de ce qu'on rostit à la broche, dans le four, sous la cendre, ou d'autre maniere ; & tant des choses solides, comme le pain, les viandes, les fruits, que des liqueurs, comme le vin, les syrops, &c. Il faut que les viandes cuisent à petit feu pour estre bonnes. Il faut qu'elles soient pourries de cuire pour faire de bonne gelée. Le secret d'un Cuisinier, c'est de faire cuire à propos les viandes. Les pois ne cuisent pas bien dans de l'eau de puits. Ce mot vient de coquere.

CUIRE, signifie aussi, Digerer ; & se dit de cette seconde preparation des aliments qui se fait dans l'estomac, pour les rendre propres à estre couverties en nostre substance. L'estomac s'appelle indigeste, quand il ne cuit pas bien les viandes. Il faut que la chaleur naturelle cuise bien les humeurs pour entretenir la santé.

CUIRE, se dit aussi de plusieurs choses qu'on employe à d'autres usages, quand on en veut rendre la consistence plus espaisse, ou en faire sortir tout à fait l'humidité. Ainsi on dit, Cuire du fil, de la soye, de la colle ; cuire de la chaux, du plastre. En Orient les briques se cuisent au Soleil, en France dans des fourneaux.

CUIRE, se dit aussi en parlant de cette preparation que la chaleur donne naturellement aux fruits. Le Soleil cuit les raisins, les melons & les figues, &c.

CUIRE, se dit quelquefois absolument du pain en particulier. Ce Boulenger cuit deux ou trois fois par jour. A la campagne tous les bourgeois cuisent à la maison. Il est deffendu de cuire les jours de Festes solemnelles. C'est une grande servitude d'aller cuire au four bannal.

CUIRE, se dit hyperboliquement d'une chaleur ou douleur excessive qu'on souffre. Le Soleil est si ardent en cette saison, qu'on cuit dans cette campagne. Ceux qui souffrent une grand migraine, disent que la teste leur cuit.

CUIRE, se dit aussi des ardeurs extraordinaires qui viennent des playes, des excoriations, fluxions, inflammations, &c. qui causent une douleur semblable à celle que cause le feu qui touche quelque partie. Une playe qui est exposée à l'air cuit davantage, que quand elle est bandée. Quand le pus se forme dans une playe, cela cuit beaucoup. Les yeux cuisent, quand ils sont rouges & enflammez.

CUIRE, se dit figurément en choses morales, des mauvaises suittes des affaires, qui causent de la douleur & du repentir. Il a dit une parole, il a fait une sottise qui luy cuira long-temps.

On appelle un boute-tout-cuire, un goinfre qui ne trouve rien de mauvais, qui veut manger en une fois tout ce qu'il y a dans une maison. On dit aussi en goinfrerie, Il est trop cuit pour manger cru, quand on a telle impatience de manger, qu'on ne veut pas donner le loisir à la viande de cuire. On dit aussi, qu'un homme est cuit, qu'il est fricassé, pour dire, que sa fortune est ruinée, que son credit, que sa reputation sont perdus. On dit aussi qu'il n'a pas la teste bien cuitte, pour dire, qu'il est un peu extravagant, qu'il n'est pas assez meur. On dit aussi, qu'un homme a du pain cuit, pour dire, qu'il a beaucoup de bien, qu'il se peut passer de travailler. On dit encore, Trop gratter cuit, trop parler nuit, pour dire, qu'il faut s'abstenir de se gratter, & de parler. On dit encore d'une place mal fortifiée, qu'on la prendroit avec des pommes cuittes ; & aussi de celuy qu'on menace de battre, Je luy rendray le visage plat comme une pomme cuitte.