s. m. Fleur odoriferante qui vient sur une plante de même nom, qui a de longues feuilles toûjours verdoyantes, dont sa tige haute de deux coudées est revestuë depuis la racine jusqu'au haut. Il en sort de petites branches verdes & longuettes, qui se changent en une fleur blanche & odorante qui a les bords renversez, & qui est ridée par dehors. On voit au milieu de petites Ostamines jaunes qui ont une autre odeur que la fleur. Il y a aussi au milieu un bouton ou pistil où est sa graine. Sa racine est bulbeuse, blanchastre, & toute escaillée comme celle de la joubarbe. Il y a un lis rouge que les Grecs appellent cynorrhodes, c'est à dire, rose de chien ; & un lis jaune qu'on appelle hemerocole ou lis sauvage ; un lis d'estang, qu'on appelle nenuphar. On met aussi le martagon & le muguet au rang des lis. Ce dernier estant appellé lilium convallium. Et quelques-uns appellent le chevre feuille lilium inter spinas. Il y a aussi un lis nain d'Acadie à fleurs rouges, pointilléez, dont la tige ne porte qu'une seule fleur semblable au martagon de Canada, avec un pistil de couleur de chair, & du reste semblable aux autres lis. On en voit la figure dans les Memoires du Sieur Dodard. Voyez ces mots à leur ordre. Il y a aussi des lis d'Inde qui sont violets, des lis orangers. Il y en a qui mettent les tubereuses entre les especes de lis, parce qu'elles viennent d'oignons & sur de hautes tiges, & ont des feuilles recoquillées, quoy que ce soient des plantes d'ailleurs fort differentes. Le lis a esté chez tous les peuples estimé pour sa blancheur & sa pureté. JESUS-CHRIST commande à ses Disciples de considerer les lis qui ne travaillent, ni ne filent, & cependant la Providence en a tant de soin, qu'elle les égale à la pourpre de Salomon. Virgile parlant de Marcellus, veut qu'on luy presente des lis à pleines mains, au sixiéme Livre de l'Eneide.

LIS, en termes de Blason, se dit des fleurs dont l'Escu de France est chargé. Son origine & sa nature sont assez controversées chez les Auteurs. La plus saine opinion est que ce fut Louïs VII. dit le Jeune qui prit le premier des fleurs de lis, part allusion à son nom de Loys, & parce qu'on le nommoit Ludovicus Florus. Aussi est-ce le premier qui en mit une dans son contrescel. Ce fut Charles VI. qui reduisit les fleurs de lis à trois dans l'Escu de France ; & Charles V. son pere est le premier dont on trouve des sceaux où l'Escu est couronné d'une couronne ouverte & fleurdelisée. Auparavant les Auteurs ont attribué à la France pour Armes trois Croissants, trois couronnes, un navire, la pile & la croix, un lyon, un dragon, une aigle, un boeuf, des abeilles, une alloüette, des diademes, & trois crapaux. Car quant à ce qu'on dit, que les fleurs de lis furent apportées par un Ange à Charlemagne, ou à un Hermite aprés le Baptesme de Clovis, ou que St. Denis les donna à la Maison de France, comme dit Gerson ; c'est une opinion refutée par tous les sçavants, aussi-bien que celle de la Banniere de Dannemarc ; de la croix de Thoulouse, des hermines de Bretagne, que quelques-uns ont pretendu aussi estre descenduës du Ciel.

Quant à leur nature, quelques-uns pretendent que ce sont des figures de lis de jardin ; les autres des bouts de sceptre ; d'autres des partuisanes Françoises nommées Francisques ; d'autres des iris, flambes, ou pavilles. La plus probable opinion est que ce sont des francisques, parce qu'elles en ont conservé entierement la figure. Ceux qui tiennent que ce sont des iris, croyent qu'on a dit fleurs de lis par corruption de fleurs de l'iris : que son nom de flambe a esté cause qu'on a nommé oriflambe la Banniere de St. Denis fleurdelisée : & que les premiers Francs choisirent l'iris pavillée, ou le lis des marais pour marquer leur origine, à cause qu'ils venoient des marais de frise ; & que celle du cimier des Ducs de Bourgogne qui est à quatre fleurons, represente une flambe entiere. Les Critiques qui en ont escrit sont Chiflet, le Pere Tristau de St. Amand, le Pere Ferrand, de la Roque, de Ste. Marthe, Du Tillet en son Recueil sur l'Oriflambe, Du Cange sur l'Histoire de Joinville, le Pere Menestrier, & le Pere Rousselet Jesuïte, qui a ramassé ce que tous les autres Auteurs ont dit sur les fleurs de lis. On voit une Dissertation dans le III. Volume du Pere Henschenius de tribus Dagobertis, où il dit qu'il se trouve une medaille de Dagobert I. où il est representé tenant trois sceptres, pour signifier les Royaumes d'Austrasie, de Normendie, & de Bourgogne : & de là sont venues les Armes des fleurs de lis, parce qu'estant liez ensemble par le bas, ils ne ressemblent pas mal à la fleur de la plante nommée Iris, ou flambe, que les Allemands appellent Lisckblum, c'est à dire, fleur de lis, dont on leur donna le nom : on les fit d'or, parce que cette fleur est jaune. On les mit au champ d'azur, à cause qu'elles naissent ordinairement dans l'eau, dont la couleur est bleuë ; & parce que les Latins ont appellé cette fleur lilium celeste, quelques-uns ont cru qu'elle venoit du Ciel. Quelques-uns croyent que Philippes le Bel fit battre une monnoye qu'on appelloit florin, à cause que d'un costé il y avoit une croix fleurdelisée, & que les liards prirent aussi leur nom du lis, dont ils portoient la marque.

Les lis se blasonnent diversement. Il y a des lis au pied nourri, ou au pied couppé, qui sont sans queuë. Quelquefois les lis sont representez tels qu'ils sont sur le pied, qu'on blasonne lis naturels, ou lis de jardin. Le lis renversé est celuy qui est tourné sens dessus dessous, qui represente une forme de cloche fenduë par le bas. Le lis est le symbole de l'esperance, de la beauté, de la pudicité, comme on voit en plusieurs medailles Romaines. L'ancienne Banniere de France estoit semée de fleurs de lis sans nombre. Les Chambres des Cours Souveraines, & même celles des Justices Royales sont tapissées de fleurs de lis. Les Chanceliers & les Gardes des sceaux ont droit d'avoir des tapisseries semées de fleurs de lis : & on dit des Juges dans leur tribunal, qu'ils sont assis sur les fleurs de lis.

On appelle lis, une piece d'or marquée au Revers du pavillon de France, qui vaut sept livres. Il y avoit aussi des lis d'argent qui valoient vingt sols, qui n'ont pas eu cours long-temps.

Les lis d'or & d'argent ont commencé d'estre fabriqués au mois de Decembre 1655. Le lis d'or pese 3. deniers, 1/2 grains. Il y en a 60. & 1/2 au marc : ils sont au titre de 23. carafs & un 1/4 au remede d'un 1/4 de carat.

FLEUR DE LIS, est encore un supplice qu'on fait souffrir aux larrons de ville, & aux couppeurs de bourse. On les condamne à estre flestris d'une fleur de lis, qui s'applique sur l'espaule avec un fer rouge marqué d'une fleur de lis.

LIS, se dit figurément & poëtiquement du Royaume de France, qu'on appelle l'empire des lis, à cause de ses Armes, comme on dit aussi l'aigle, pour l'Empire. la Rose, pour l'Angleterre, &c.

On le dit aussi pour exprimer une grande blancheur. Un teint de lis & de roses.