subst. fem. Femelle qui a porté, qui a mis de son fruit au monde. On le dit par excellence de Marie qui est la Mere de Dieu, qui a esté seule vierge & mere. Elle est appellée nostre premiere Mere. La Reine Mere est la Reine Doüairiere. Cette femme est mere de six enfans, elle a pour tous une tendresse de mere. Les petits des animaux suivent leur mere, tettent leur mere, se cachent sous l'aisle de leur mere. La Loy de Moyse deffendoit de tuer la mere & les petits. On a appellé aussi mere, celle qui ne l'est que par titre ou adoption. Le Sauveur dit à St. Jean en luy monstrant la Vierge, Voilà vostre mere : & depuis ce temps-là cet Apostre la prit pour sa mere.

Les Poetes & les Payens ont dit que Venus estoit la Mere des Amours, & des Graces : que Cibele estoit la Mere des Dieux : que Deucalion jetta derriere luy les os de sa grand mere pour faire les hommes, c'est à dire, des pierres ou les os de la terre.

MERE, se dit aussi d'une plante rare qu'on a cultivée, & qui en a produit plusieurs autres du même jardin. Ainsi un fleuriste dira, Voilà une Tulippe rare, un amidor de la belle espece, c'est la mere de toutes les autres que vous voyez.

MERE, se dit aussi des perles. Les Joüailliers disent que la mere perle ou Reine perle est celle qui conduit les autres, qui sont beaucoup plus petites, comme la Reine des mouches à miel est suivie par les abeilles. Elle est si grosse, qu'en serrant sa coquille elle couppe ou endommage la main de ceux qui taschent à la prendre.

MERE, se dit aussi en ce sens des pierres precieuses. La mere d'un rubis, la mere d'une esmeraude, c'est-à-dire, les matrices ou les pierres dans lesquelles elles commencent à se former.

MERE NOURRICE, signifie celle qui donne à tetter, qui nourrit un enfant au lieu de la vraye mere. Et en ce sens on dit figurément, que la Bourgogne & la Beauce sont les meres nourrices de Paris qui luy fournissent de pain & de vin.

MERE, en termes de Chasse, se dit de l'entrée ou du trou de la taniere d'un renard ou autre beste. La renardiere n'a jamais qu'une mere.

MERE, se dit aussi de la partie de la femme où se forme le fetus : & on dit en ce sens, qu'une femme a des maux de mere, pour dire qu'elle est tourmentée des fumées de la matrice. On appelle aussi en Medecine, pie & mere, & dure mere les deux membranes du cerveau. Voyez Meninge.

MERE, se dit figurément en choses spirituelles & morales. On dit par excellence, Nôtre Mere Ste. Eglise, en parlant de l'Eglise Romaine. Celuy-là n'aura pas Dieu pour pere, qui ne voudra avoir l'Eglise pour mere. On fait aussi chés les Cath. Rom. tous les contracts de mariage avec cette clause, si Dieu & nôtre Mere Sainte Eglise y consentent.

MERE, se dit aussi des Eglises qui en ont fondé ou establi d'autres. Quand la Procession de Notre-Dame de Paris marche, on y voit les bannieres de la mere & de ses quatre filles. C'est un inceste spirituel de posseder la mere & la fille, c'est à dire, deux benefices dont l'un est à la nomination de l'autre.

MERE, se dit aussi au spirituel d'une superieure du Couvent, ou des anciennes Religieuses du Choeur. C'est la reverende Mere Abbesse, la Mere Prieure, la Mere Sacristaine, Celeriere, &c.

MERE, se dit aussi des causes morales, des vices, & de vertus. L'oisiveté est la mere de tous les vices. La deffiance est la mere de seureté. La necessité est la mere des inventions. L'Université de Paris a esté la mere de plusieurs grands Docteurs qu'elle a produits, qu'elle a eslevez. La Grece a esté la mere des Arts liberaux & des sciences. On dit qu'une femme est la mere des pauvres, quand elle leur fait beaucoup de charitez, quand elle les fait vivre. On dit qu'elle est la mere aux escus, quand elle est fort riche & avare. On appelle aussi langue mere ou matrice, celles qui n'ont point esté composée du meslange de plusieurs langues voisines & corrompuës.

MERE, se dit proverbialement en ces phrases. C'est le ventre de ma mere, je n'y retourne plus, quand on a esté mal satisfait d'un lieu où on ne veut plus retourner, d'une affaire qu'on ne veut pas recommencer. On dit aussi d'une personne qu'on a fort rabroüée, qu'on l'a bien renvoyée chez sa mere grande. On dit aussi d'une chose qui est devenuë fort rare. On ne la trouve plus, la mere en est morte. On dit qu'une fille suit ordinairement les pas de sa mere, pour dire, qu'elle prend ses manieres de vivre. On dit aussi, il veut apprendre à sa mere à faire des enfans, quand quelqu'un se mesle d'enseigner à un autre une chose qu'il sçait mieux que luy. On appelle des contes de ma mere l'oye. des contes de vieille.

BELLE-MERE, GRAND-MERE, Voyez à leur ordre.