v. act. Acquiter une dette, un devoir. Paier le prix d'une chose achetée. Ce bourgeois a acheté cette terre, & il l'a bien paiée. On pate quelquefois des deniers d'emprunt, pour lesquels on consent une hypotheque privilegiée sur la chose. Les Notaires sont obligés de faire mention des deniers, comptes, nombre, & paiés en telles ou telles especes. JESUS-CHRIST ordonna qu'on paiast le tribut à Cesar. Il a été condamné à paier nonobstant sa remontrance. On l'a contraint à paier par execution de ses meubles. Les creanciers ne seront paiés qu'au sol la livre par contribution. Ce mot vient de pagus, à ce que dit Nicod, à cause que les gens de village sont ceux qui paient le plus d'imposts, ou ceux qu'on fait paier le plus aisément. Il vient de pacare, parce que celuy qui paie appaise ses creanciers ; comme quitte & quittance viennent de quietus & quietatio. Saumaise croit qu'il vient de pactare, c'est à dire, tributum, vel pactum solvere.

PAIER, se dit quelquefois des choses inanimées qui doivent un certain droit. Cette marchandise paie tant à la Doüane. Le muid de vin paie tant d'entrée, paie tant de gros. Le pied fourché se paie à la porte, au Bureau. On dit aussi, qu'une charge paie Paulette, pour dire, qu'on peut empêcher qu'elle ne soit vacante par mort. Ce Benefice paie tant de decimes, d'annates. Cette Generalité paie tant de tailles. On dit aussi, qu'il faut paier le tribut à la mort, à la nature, à l'amour.

PAIER, se dit quelquefois des liberalités qu'on fait à autruy, quand on satisfait au lieu de luy. Il luy a paié à disner. Cette fille a paié aujourd'huy sa feste. Ce prisonnier a paié sa bienvenuë. Quand des gens du peuple se rencontrent, ils s'entredisent, Veux-tu paier pinte, chopine ? Les Peres de la Mercy ont racheté les esclaves, ils ont paié pour eux leur rançon. On dit en ce sens, que JESUS-CHRIST nous a racheté de son sang precieux, qu'il a paié pour tout le genre humain.

PAIER, se dit quelquefois en parlant des ressentiments de vengeance, des menaces, & des peines & supplices. Vous avez fait un affront à ce brave, tost ou tard vous le paierez, il vous le fera paier plus cher qu'au marché. Si ce malheureux a fait la faute, il en paie la peine. Vous en paierez la folle enchere, les pots cassés. Ce malheureux a été pris au milieu d'une sedition, il paiera pour tous les autres. On dit aussi de celuy qui a receu quelque coup, ou quelque forte replique, qu'il a été paié, qu'il a receu son fait. Il a paié cherement & avec usure le tort qu'il a voulu faire à sa partie.

PAIER, se dit aussi des recompenses, salaires, ou satisfactions equivalentes. Cet homme est bien divertissant à table, il paie bien son écot. Cet Auteur dit de bonnes choses, il paie bien son lecteur. Cette Dame luy fait bien paier ses faveurs, elle exige de longs services, de grandes assiduités. Un mauvais debiteur paie d'excuses & de remises. Un honneste homme se paie de raison. Il a pris de bons nantissements, il se peut paier par ses mains. On dit aussi pour bien loüer quelque chose, ou quelque bon mot, Cela ne se peut paier. On dit aussi d'un ingrat, qu'il a mal paié, qu'il a mal reconnu les services qu'on luy a rendu. On dit aussi, qu'un Capitaine paie de sa personne, quand à la guerre il s'expose aux dangers comme les moindres soldats : qu'un homme paie de mine, quand il est bien fait & agreable.

PAIER, se dit proverbialement en ces phrases. C'est la coustume de Lorris, où le battu paie l'amende. Voyez l'explication de ce proverbe à Coustume. On dit qu'un homme paie les violons, & que les autres dansent, quand quelqu'un fait les frais d'un divertissement où il a le moins de part. On dit aussi, que qui répond paie, qui casse les verres les paie. On dit d'un homme dur à la desserre, qui ne veut ni compter, ni paier, qu'il paie bien, quand il paie comptant ; qu'il paie en chats & en rats, pour dire, par parcelles, & en mauvaises denrées, voyez l'explication de ce proverbe à Chat ; qu'il paie en monnoye de singe, en gambades ; qu'il paie en Louïs, quand il obtient des lettres de respit qui commencent par LOUÏS. On dit au contraire de celuy qui paie bien, qu'il paie en Changeur, en Saulnier. On dit aussi, Tant tenu, tant paié, pour dire, qu'il faut paier à proportion du temps de service. On dit aussi, Qui mange la vache du Roy, à cent ans de là en paie les os. On dit aussi ironiquement à celuy à qui on fait banqueroute, Vous voilà paié.